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jeudi 26 décembre 2013

La question des Rwandophones expliquée à mes cousins

Congo Indépendant
23/12/2013

Cet article est une version remaniée d’un extrait du livre du même auteur intitulé "La Deuxième Guerre Occidentale contre le Congo. Offensives des médias et dessous des cartes", Paris, L’Harmattan, 2006. Mayoyo Bitumba Tipo-Tipo

Depuis que des Tutsi ont pris des armes pour revendiquer la nationalité congolaise, on aura tout entendu au Congo. A quand remonte la présence des Tutsi ou celle des Rwandophones en général ? Comment cette présence fut-elle gérée par l’Etat congolais au fil des années ? Telles sont les deux questions auxquelles cet article tente d’apporter des éléments de réponse afin que cesse l’amalgame et que cette question soit abordée de manière responsable par le législateur congolais. 

Les Rwandophones au Congo 
Au Kivu vivent des Hutu et des Tutsi, établis avant, pendant et après la colonisation. En 1885, avant la création de ce qui deviendra le 30 juin 1960 la République du Congo-Kinshasa, des sujets du Mwami rwandais, essentiellement des Hutu, avaient fui leur royaume et s’étaient installés au Nord-Kivu où ils avaient établi des liens matrimoniaux avec les populations autochtones (Willame J.-C., Banyarwanda et Banyamulenge. Violence ethnique et gestion de l’identitaire au Kivu, Les cahiers africains n° 25, Bruxelles, CEDAF, Paris, L’Harmattan, 1997). Cette émigration a donné naissance à une tribu, celle des Banya Bwisha (les gens de Bwisha), également présents au sud-ouest de l’Ouganda. « Dans le Bwisha congolais, ceux-ci sont constitués en chefferie autonome depuis 1920, sous l’autorité du Mwami Ndeze de 1920 à sa mort en 1980. Ailleurs au Kivu, ces populations cohabitent avec les Hunde, les Havu, les Shi, les Fulero, etc. depuis des dates diverses » (De Saint-Moulin, L., Conscience nationale et identités ethniques. Contribution à une culture de la paix, in Congo-Afrique, décembre 1998). 


Peu avant 1885, « quelques familles de pasteurs Tutsi, fuyant le Ruanda traversèrent la Ruzizi, pénétrèrent au Congo Belge et se fixèrent en premier lieu à Lemera dans la chefferie des Fulero au Sud-Kivu. Les descendants de ces émigrés gagnèrent la chefferie des Vira et y fondèrent les villages de Galye, Munanira, Kishombwe et Kalonge-Kataka, au-dessus des derniers villages Vira. L’immigration ne donna pas lieu à des réactions hostiles de la part des Vira parce qu’elle se localisa en dehors des terres occupées par ceux-ci » (Weis, G., Le pays d’Uvira. Etude de géographie régionale sur la bordure occidentale du lac Tanganika, Bruxelles, Duculot, 1959). 

Pendant la colonisation, l’émigration des populations du Ruanda-Urundi vers le Kivu revêtit deux formes : l’émigration spontanée et celle des transplantés qui eut lieu surtout à partir des années 30 jusqu’au milieu des années 50. On était transplanté de façon individuelle, à la suite d’un recrutement pour les plantations européennes du Kivu (et les mines du Katanga), ou par familles entières, à la fois pour pallier les famines récurrentes au Ruanda-Urundi et pour décongestionner un territoire relativement surpeuplé. 

Au sujet des recrutements pour les mines, « une mission de cinq agents de l’Union Minière du Haut-Katanga recruta des Rwandais de 1926 à 1931, à une époque où des Rwandais quittaient aussi leur pays pour chercher de l’embauche en Uganda » (Mayuma, A. et Hakiba, B., cités par De Saint-Moulin, L). Quant au glissement de la population, constituée essentiellement de Hutu, il n’avait touché que le Nord-Kivu. « Pendant une première période (1937-1947), le Congo Belge ouvrit à l’émigration des Banyarwanda 37.000 ha de terre fertile dans le Gishari » (Rapport sur l’Administration Belge du Ruanda-Urundi pendant l’année 1959. Présenté aux Chambres par Monsieur le Ministre des Affaires Africaines, Bruxelles, Imprimerie Van Muysewinkel, 1960). Une fois ce territoire saturé, une autre aire d’émigration fut ouverte, « la région des Washali-Mokoto-Mushari-Bwito » (Ibidem), cette fois de 1949 à 1953. La Mission d’Immigration des Banyarwanda dirigea les émigrants vers les nouvelles terres. « Cependant, un certain nombre d’émigrants se sont infiltrés dans les régions non strictement contrôlées par la Mission, ou ont continué à s’installer dans les régions déjà saturées » (Ibidem). 

Avec la décolonisation et les indépendances, le Kivu va s’enrichir de bien d’autres strates de population d’origine étrangère. « Entre 1959 et 1964, des vagues de réfugiés tutsi, fuyant les pogroms du Rwanda voisin, s’installent et s’intègrent progressivement dans le Nord et le Sud-Kivu. Sommairement installés dans des camps de réfugiés situés principalement dans les territoires de Masisi, Walikale et Kalehe, ils ne vont pas tarder à s’immerger progressivement dans le pays d’accueil. Cette immersion a été facilitée par le fait qu’en 1967, le gouvernement congolais décida de fermer tous les camps de réfugiés administrés par le HCR » (Willame, J. C.). A la même époque, Jan Vansina signale la présence d’autres immigrants relativement récents, les Rundi, dans la plaine de la Ruzizi au Sud-Kivu, qui sont culturellement à rattacher aux Rundi (essentiellement Hutu) du Burundi (Vansina, J., Introduction à l’ethnographie du Congo, Kinshasa, Ed. Universitaires du Congo, 1966). A ces immigrés viendront s’ajouter des Tutsi chassés du Rwanda par le pogrom de 1973-74 visant essentiellement les intellectuels, des Hutu fuyant les pogroms du tutsi power au Burundi et enfin les réfugiés économiques et les clandestins, possédant généralement les cartes d’identité de leurs pays d’origine et du pays d’accueil. 

Dans le Congo des années Mobutu, la faillite de l’Etat aidant, tout étranger originaire d’Afrique subsaharienne pouvait s’octroyer la nationalité congolaise. Il suffisait pour ce faire de se procurer une carte d’identité, même dans la rue. Ce que firent des milliers de réfugiés et de clandestins rwandais et burundais au Kivu, comme des milliers de réfugiés et de clandestins angolais dans le Bas-Congo, au sud de Bandundu et à Kinshasa. Le drame est que le Kivu est une région surpeuplée, où la densité rurale a toujours été largement supérieure à la moyenne nationale. Déjà en 1955, on dénombrait, pour la région de Rutshuru, Masisi, Kalehe, Kabare, Mwenga, Fizi et Uvira, « une population rurale de 640.000 habitants sur 27.000 km2, soit une densité moyenne de 23/km2 ; la moyenne générale du Congo était de 4,23/km2 » (Gourou, P., La densité de la population rurale au Congo belge, ARSC, classes de sciences naturelles et médicales, Bruxelles, 1955). Les problèmes fonciers se posent donc avec beaucoup plus d’acuité au Kivu qu’ailleurs au Congo. Ce qui explique en partie le conflit de nationalité qui a toujours régné dans la province. 

Il est à noter qu’à l’instar du mouvement de retour de nombreux réfugiés angolais au lendemain de l’indépendance de leur pays, c’est par milliers que les réfugiés tutsi qui s’étaient octroyés la nationalité congolaise sont rentrés dans leur mère patrie au lendemain du rétablissement de l’hégémonie tutsi au Rwanda, suite à la victoire du Front patriotique rwandais (FPR) en 1994. 

Gestion du conflit de nationalité au Kivu 
Les premiers conflits entre les « originaires » et les « non-originaires », les « autochtones » et les « allochtones », les Congolais « authentiques » et les Congolais « à nationalité douteuse », les Congolais et les « Congorais » ou encore entre les Congolais et les « Rwandais » ne datent pas d’aujourd’hui. Ils remontent à l’époque coloniale. 

En 1944, les autorités coloniales élevèrent le Gishari au Nord-Kivu au rang de chefferie autonome, avec un certain Buchanayandi comme chef, placé sous l’obédience politique du Mwami Rudahirwa du Rwanda. Buchanayandi et ses administrés tentèrent de se lancer à la conquête de nouvelles terres au détriment des populations autochtones. Des vives tensions s’ensuivirent aussitôt. 

En 1949, le gouverneur de la province du Kivu, Liesnard, donnait cet avis au gouverneur général Petillon : « La création de la chefferie Gishari a été une erreur politique. Nous ne devons pas répéter l’erreur politique commise au Gishari. Les Banyarwanda viendront avec leurs notables, mais ils devront dépendre politiquement des autorités indigènes du Congo Belge. Nous ne pouvons spolier les autochtones de leurs terres, et nous devons tenir compte des droits réels des chefs du Congo Belge » (Mahangaiko, L. & alii, Zaïre : Peuplement millénaire des autochtones du Nord-Kivu. Vers de nouveaux indices, Kinshasa, 1996). En 1957, Buchanayandi fut révoqué et renvoyé au Rwanda. Les droits de la chefferie Bahunde sur le Gishari furent rétablis. Les transplantés installés au Gishari comme ailleurs dans le Kivu restèrent sur place mais placés sous l’autorité des chefs coutumiers locaux du Congo Belge. 

Dans le Sud-Kivu, les pasteurs tutsi installés sur les hauts plateaux de l’Itombwe furent accusés de vouloir dominer les populations autochtones et de les soustraire à l’influence européenne. Aussi furent-ils l’objet d’une discrimination sévère de la part du pouvoir colonial (Weis, G.). Le géographe G. Weis enseigne que « les territoires de Mwenga, Fizi et Uvira se les rejetèrent longtemps, les refoulant dès qu’ils manifestaient l’intention de se fixer en un point. En 1950 seulement, on leur permit, en même temps qu’à une population hétérogène de Congolais, d’installer des villages fixes dans les dépressions de la Bijombo et de la Musondja » (Ibidem). Leur spécificité avait même donné naissance à la création d’une entité administrative autonome accordée par l’Etat Indépendant du Congo en 1906, confirmée en 1910 par le colonisateur, mais définitivement supprimée en 1933 (Willame, J. C.). 

Quelles que furent les tensions entre les Congolais de souche et les peuplades originaires du Ruanda-Urundi au Kivu pendant la période coloniale, on retiendra que le colonisateur a su les gérer de façon rationnelle. A l’accession du Congo à l’indépendance, le 30 juin 1960, tous les transplantés étaient des Congolais à part entière. Ainsi, « la loi relative aux élections législatives de mars 1960 disposait que les ressortissants du Ruanda-Urundi résidant au Congo depuis dix ans au moins étaient admis à voter » (Ibidem). 

Les conflits ethniques qui endeuillèrent le Congo au lendemain de l’indépendance n’ont pas épargné le Kivu. En 1963, la tension entre les « autochtones » et les « allochtones » était telle que les Congolais « authentiques » du Nord-Kivu parlaient déjà d’un plan des Banyarwanda « visant à conquérir par la force et à occuper la totalité des territoires de Rutshuru, Goma, Walikale et Kalehe » (Ibidem). Ce qui a sans doute contribué à ce que l’article 6 de la constitution de 1964 n’attribue la nationalité congolaise qu’à « toute personne dont un des ascendants est ou a été membre d’une tribu ou d’une partie de tribu établie sur le territoire du Congo avant le 18 octobre 1908 », date du passage de l’Etat Indépendant du Congo (propriété personnelle du roi Léopold II) au Congo Belge. Les transplantés de l’époque coloniale se retrouvaient ainsi dans la même catégorie que les réfugiés. Le déni de nationalité qui frappait les premiers était toutefois atténué du fait qu’ils pouvaient se voir octroyer la nationalité congolaise « s’ils en faisaient la demande expresse dans un délai de 12 mois et s’ils renonçaient à leur nationalité rwandaise » (Ibidem). 

Si en principe le conflit était résolu, en pratique l’incertitude restait totale. Pour remédier à cette situation, une troisième lecture légale intervint en 1972 concernant le statut des Banyarwanda, sous la guidance de l’un des leurs, Barthélemy Bisengimana, qui occupa le poste de directeur du Bureau de la Présidence de la République de mai 1969 jusqu’en février 1977. « Au terme de l’article 15 de cette loi, tous les originaires du Ruanda-Urundi établis au Kivu avant le 1er janvier 1950 et qui ont continué à résider depuis lors dans la République du Zaïre sont censés être de nationalité zaïroise. Cette décision concernait quelques 300.000 personnes réparties surtout dans le Masisi et dans une mesure moindre dans les territoires du Rutshuru, Walikale et Goma. Elle ne réglait toutefois pas clairement le cas des réfugiés tutsi qui avaient émigré au Zaïre après 1959 » (Ibidem). 

La nouvelle loi ne sera pas digérée par les « autochtones ». Dans le Masisi, par exemple, elle plaçait ceux-ci dans la position des Kanak face aux Caldoches en Nouvelle Calédonie ou des Flamands face aux Francophones à Bruxelles. Ils devenaient minoritaires par rapport aux « allochtones ». Sous la poussée de leurs représentants au parlement, cette loi sera annulée par celle portant le numéro 81-002 du 29 juin 1981. Au terme de l’article 4 de la nouvelle loi, est zaïroise « toute personne dont un des ascendants est ou a été membre d’une des tribus établies sur le territoire de la République du Zaïre dans ses limites du 1er août 1885 - ce qui écartait d’emblée la vague d’immigrés rwandais importés par le colonisateur à partir des années 30 » (Ibidem). 

Une fois de plus, la nouvelle loi n’apportera, sur le plan des faits, aucune modification dans le statut de citoyenneté des originaires du Ruanda-Urundi. Car dans le Zaïre de Mobutu, la loi n’était qu’un chiffon de papier et le « Guide éclairé », la loi faite homme. Seule comptait sa volonté. Dans la gestion du conflit de nationalité au Kivu, l’incertitude était plus bénéfique pour le despote que ne l’était la clarification. Ce qui contribuait à entretenir le mythe de Mobutu Pacificateur ou Unificateur. 

La pax mobutista avait tenu le conflit en latence pendant un quart de siècle. Il fut réactivé par la dynamique de la démocratisation. La nationalité de l’élite « allochtone » du Nord-Kivu fut remise en cause à la commission de vérification et de validation des mandats de la Conférence Nationale Souveraine (CNS). Les diatribes des représentants « autochtones » à la CNS contre les « étrangers rwandais » s’accompagnèrent d’affrontements sanglants dans le Masisi en 1991. Un groupe d’intellectuels tutsi du Sud-Kivu lança un appel à la CNS en juillet de la même année, réclamant « un cadre juridique pour la protection des droits des minorités ethniques ». L’assassinat de plusieurs Hutu et la destruction du cheptel bovin des Tutsi du Nord-Kivu furent à déplorer entre février et décembre 1992, etc. » (Ibidem). 

Si dans ses conclusions la CNS plaidait pour une gestion saine de l’identitaire qui déchirait le Kivu, la classe politique une fois réunie au sein du parlement de transition en décidera autrement. En avril 1995, elle exigeait dans une de ses résolutions « l’application sans délai de la loi de 1981 et l’annulation de tout acte de vente, d’acquisition ou d’attribution de titres fonciers ou immobiliers au bénéfice des immigrés et transplantés ayant acquis frauduleusement la nationalité zaïroise ainsi que l’annulation de tout acte de nomination de réfugiés et immigrés rwandais ou burundais dans les fonctions publiques » (Ibidem). 

Cette fois, Mobutu « Personne-Etat » n’avait pas intérêt à mettre tout son poids dans la balance pour protéger tous ceux qu’on désignait du doigt : Hutu et Tutsi confondus. Sous le mobutisme triomphant, son soutien à ceux-ci, plus particulièrement aux Tutsi, était inscrit dans une stratégie politique consistant à « faire monter au pouvoir les représentants de groupes ethniques qui ne constituaient pas une menace pour le régime du fait de leur faiblesse numérique et de l’ambiguïté de leur statut social et politique » (Ibidem). Dans la foulée de la démocratisation et surtout en égard aux retombées du conflit rwandais, cette stratégie n’était plus payante. 

Conclusion 
Comme on l’aura constaté, la responsabilité de l’Etat congolais reste clairement établie dans la gestion calamiteuse du dossier des populations d’origine rwandaise. Cela ne signifie nullement que la solution que des élites tutsi soutenues par la dictature tutsi rwandaise et des mains occidentales invisibles soit viable. L’histoire l’a suffisamment démontré, les solutions obtenues au bout du fusil n’assurent pas de paix durable entre communautés, surtout quand les unes se disent autochtones tandis que d’autres sont perçues comme allochtones. Au nom des intérêts égoïstes évidents, la dictature de Mobutu s’était montrée accommodante vis-à-vis de la question des Rwandophones sans pour autant la régler. Les deux Kabila ont marché l’un après l’autre sur les pas de Mobutu au nom de mêmes intérêts et pour le même résultat. La démocratie brouillonne, celle issue de la CNS ou de la constitution en cours, n’a pas fait mieux. Incapable de séparer le bon grain de l’ivraie, elle a légitimé la revendication de la nationalité par les armes. Il appartient aux Congolais d’explorer des sentiers non battus afin de construire un Etat de droit qui permettrait enfin que cette question soit traitée rationnellement. Des Rwandophones congolais, y compris des Tutsi, cela existe bel et bien. Des textes écrits in tempore non suspecto le démontrent. 

Mayoyo Bitumba Tipo-Tipo

Licencié en coopération au développement (en 1995). Diplômé en langues et littératures françaises et anglaises.





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